
Est ce qu'il payait l'hébergement mensuellement, et, en raison du fait qu'il n'est plus parmi nous, l'hébergeur a fermé son blog ?
Ou bien est ce sa famille qui a décidé de faire fermer son blog ?
Je trouve cela vraiment triste car ses articles étaient réellement passionnants et Eric Legrand s'exprimait avec une très grande éloquence, la forme comme le fond de ce qu'il écrivait était absolument brillant...
Heureusement, sa page Facebook est toujours en ligne.
Puisque l'on reparle de ce grand comédien, sachez que le prochain numéro de Synchro crée par Olivier Barbery aura une interview fleuve de Eric Legrand, la toute dernière qu'il a accordé.
Barbery nous a donné un aperçu du début de l'interview sur sa page Facebook. En voici le début :
"« Je me suis dit que pour mon fils, peut-être, ce serait bien… »
— Éric Legrand
Il n’avait plus donné d’interviews depuis des années. Par choix. Par lassitude. Parce que les mêmes questions revenaient en boucle, et parce qu’il ne supportait plus de voir ses propos déformés, sortis de leur contexte.
Et pourtant, cette fois, il a dit oui.
Oui à une ultime interview. Oui à une prise de parole rare et sincère.
Pourquoi ? Pour laisser une trace. Pour que son fils, un jour, puisse lire ces mots. Pour faire le point, simplement, avec pudeur et franchise.

Un échange dense, touchant, vrai. Un hommage à une voix qui a marqué notre imaginaire collectif.
Aujourd’hui, nous avons choisi de partager avec vous la toute première réponse qu’il nous a offerte. Elle ouvre cet entretien avec une force désarmante, et dit déjà tout de lui : sa droiture, ses doutes, sa lucidité.

Synchro : Bonjour Éric, comment allez-vous ?
Eric Legrand : Olivier, avant toute chose, je me permets de faire un petit préambule. Il y a certainement, parmi vos lecteurs, des personnes qui savent qu’il y a plusieurs années maintenant, j’ai décidé de ne plus jamais donner d’interviews. Et ces personnes seront peut-être surprises de me retrouver ici, parce qu’en effet, c’était souvent les mêmes questions, les mêmes réponses. Non pas – et qu’on ne me fasse pas dire ce que je n’ai pas dit – que cela me dérangeait ou m’ennuyait. Ce n’était pas un problème en soi. Mais à force, on finit par tourner en rond autour de son propre nombril. Et à un moment, on se dit : « Bon, j’ai dit tout ce que j’avais à dire, inutile de continuer, ça ne mène plus à rien. »
Et puis en même temps… c’est vrai. Très honnêtement – et je pense que vous l’avez compris – je suis toujours surpris que mon modeste petit parcours, parce que je le considère vraiment ainsi, sans aucune fausse modestie, puisse encore susciter de l’intérêt au point de vouloir m’interviewer. Je me dis aussi que, de toute manière, quand on aime le travail de quelqu’un, il ne faut pas forcément chercher à le connaître, car on risque d’être déçu.
Mais la raison essentielle, avant tout, c’est que je n’ai pas la langue de bois. Et tout le monde le sait maintenant. Vous vous en êtes rendu compte aussi. Je dis les choses franchement, sans détour. J’ai, par exemple, toujours assumé le fait que je n’étais pas fan des dessins animés japonais. Et forcément, il y a une meute d’imbéciles qui s’est ruée là-dessus pour en déduire que je faisais mon travail n’importe comment, que je m’en fichais… Bref, on me fait dire des choses que je n’ai jamais dites, on comprend tout de travers, on interprète n’importe comment. Résultat : je me suis retrouvé pris à partie, ici ou là, sur Internet, parfois de façon assez violente. J’ai reçu des messages privés très grossiers, très agressifs… Le dernier en date me traitait de « connard » et de « sous-merde », c’était il y a quelques semaines à peine.
Des gens qui ne m’ont jamais vu, qui me jugent sur une phrase entendue, sortie de son contexte… J’ai aussi été pris à partie par des personnes qui ne m’ont jamais rencontré. Parce que, généralement, ceux qui me rencontrent en convention trouvent que je suis ce que j’essaie d’être : avenant, aimable, gentil. Mais ceux qui ne m’ont jamais vu me jugent prétentieux, supérieur, méprisant, froid, arrogant. Qu’est-ce que j’ai pu entendre que j’étais "arrogant", de la part de gens qui, j’en suis sûr, ne savent même pas ce que ce mot signifie…
Alors un jour, j’en ai eu assez. Je me suis dit : je tire le rideau. Ras-le-bol de devoir faire face à des imbéciles. C’est une minorité, certes, mais c’est toujours cette minorité désagréable qui vous tombe dessus en premier. Donc j’ai décidé de ne plus avoir affaire aux réseaux sociaux, ni aux interviews. J’avais tout dit. Point final. Et d’ailleurs, je comprends que de vraies vedettes, de vraies stars, refusent les réseaux sociaux. C’est insupportable, cette bêtise, cette méchanceté, cette haine, cette aigreur, cette sottise. Un jour, on n’en peut plus, et on coupe.
Et puis malgré tout, en moi, il y a toujours une petite voix qui dit : « Oui, mais bon… en faisant ça, mon grand, tu te retires de la circulation. Tu gommes ton existence. Tu ne te reconnais plus le droit d’exister. Tu refuses d’admettre que, aussi modeste soit-elle, tu as ta place dans ce secteur si particulier qu’est le doublage. Alors admet-le. Reconnais-le. Vas-y. Ne t’occupe pas du reste. Et fais-le ! »
Et c’est cette petite voix qui a fini par avoir gain de cause. Une nuit, il n’y a pas si longtemps, j’ai repensé à tout cela. Et j’ai repensé à votre invitation, à laquelle j’avais d’abord répondu non. Et puis je me suis dit que, quelque part, j’approchais de la fin du chemin, que je commençais à voir le bout de la route. Et qu’il était peut-être temps de faire une sorte de point sur moi, sur mon parcours… Non pas que je pense que le monde attende ce point, ni que qui que ce soit le réclame, mais je me suis dit que pour mon fils, peut-être, ce serait bien. Peut-être qu’un jour, quand je ne serai plus là, il tombera sur cette revue. Et je me suis dit : quel meilleur endroit que votre revue, justement, parce que vous faites un très beau travail. Il sera peut-être content d’y trouver une sorte de résumé du trajet de son papa.
Alors je me suis dit : « Allez… allons-y. ».